Le domaine
Entre Château et Jardin
Le graveur et peintre namurois Félicien Rops (1833-1898) était très attaché à la région de Mettet dans la province de Namur et particulièrement au château de Thozée, gentilhommière de fière allure, campée en pleine nature.
En 1994, Elisabeth Rops, la petite-fille de l'artiste, a suscité la création du Fonds Félicien Rops dans le but de préserver les archives familiales et de sauver Thozée du délabrement et de l'oubli. Depuis son décès, en juin 1996, le Fonds Félicien Rops fait revivre ce lieu de mémoire exceptionnel classé comme monument historique par la Région wallonne.
Bien que les travaux de restauration ne soient pas encore terminés, le Fonds Félicien Rops organise régulièrement des stages artistiques et des ateliers-résidences pour écrivains et artistes plasticiens. Le Château ouvre également ses portes et l'accès à son magnifique jardin lors d'évènements grand public comme les Journées du Patrimoine, les Fêtes de la Musique ou les PicNics de l'été.
Histoire du nom "Thozée"
Au XIIe siècle, on trouve mention d'une villa Toscias qui reprend vraisemblablement le nom d'une ancienne villa romaine. Au XIVe siècle, il est fait mention de Toséee, Tosée (1315), Thozées (1330), Thosée (1332). Au XVe siècle, la graphie de Thozée apparaît (l8 juin 1472, Archives des Henry de Faveaux). Comme la ville voisine de Fosse, Thozée a longtemps fait partie de la Principauté de Liège. Avec la commune de Mettet et le hameau de Scry, elle constituait une seule entité sous le nom de Communauté de Mettet-Thozée et Scry. Celle-ci était partagée en deux seigneuries : celle de Mettet-Thozée et celle de Scry. Jusqu'à la fin de l'ancien Régime, la seigneurie de Mettet-Thozée fut presqu'en permanence placée sous l'autorité des Princes-évêques de Liège. Elle était le siège d'une haute Cour échevinale de justice.
La famille de Faveaux
La famille de Faveaux est depuis très longtemps attachée au site de Thozée. On retrouve trace de leurs ancêtres jusqu'au XVIème siècle avec un certain Pierre-Nicolas Henry alors maire de Mettet.
Les Henry devinrent par la suite des Henry de Faveaux au XVIIème siècle. Charles Antoine fut seigneur de Mettet-Thozée et anobli par Napoléon vers 1815.
Par la suite lorsque sa fille Marie Charlotte de Faveaux épousa Pierre Théodore Polet, la branche Polet de Faveaux voyait le jour. Leur fille Charlotte, l'épouse de Félicien Rops hérita ensuite du domaine.
Le patronyme Polet de Faveaux s'éteint donc au décès de Charlotte et le domaine passa finalement à son fils Paul Rops et puis à ses enfants.
L'ARCHITECTURE DU CHÂTEAU
Le site du château de Thozée est indissociablement lié au château et à la ferme : c'est dans un lieu étroit entre le château et la ferme que s'est construite l'organisation du parc et des jardins potagers et d'agrément.
L'entrée du château, c'est l'entrée de la ferme. On y accède par trois belles drèves d'essences différentes : marronniers faisant face au portail d'entrée, tilleuls à gauche et hêtres à droite. La cour de la ferme, fortement arborée est elle-même une véritable prolongation du parc.
La grange s'avance dans la drève de hêtres et dans le parc. Une partie importante de celui-ci est constituée d'anciens vergers et pâtures qui trouvent naturellement leur place dans ce lieu où la vie de la ferme est tellement proche de la vie du château.
Les bâtiments actuels sont relativement récents. La construction, entamée en l708, transformait d'anciennes fondations remontant au XVe siècle. On ne connaît pas la physionomie des bâtiments avant le XVIIIe siècle.
Le style actuel du château de Thozée se rapproche de celui des gentilhommières françaises du XVIIIe siècle, de style néo-classique, avec ses bâtiments de ferme accolés au corps de logis. Le château est formé de trois ailes disposées en U et délimitant une cour intérieure régulière pavée, fermée du côté de la ferme par une grille.
Tout le décor intérieur est intéressant car, hormis quelques éléments contemporains qui y marquent la continuité de la vie, l'atmosphère générale y est toujours véritablement XIXe siècle. A Thozée, la vie n'a jamais été absente et une émotion de vécu s'ajoute à l'émotion purement esthétique que l'on peut ressentir lors de la visite des lieux. L'ambiance n'est évidemment pas représentative du Rops parisien, mais plutôt celle qu'il a connue dans les premières années de son mariage et qu'il retrouvait lors de ses retours au pays natal.
Lors de la phase de réfection du toit, le Château a été vidé de son mobilier. Actuellement, cinq pièces et le couloir du rez-de-chaussée font l'objet d'un travail de re-scénarisation. Ils ont été classés à l'Inventaire du Patrimoine Immobilier pour leur aspect intérieur :
1. Le salon central avec son plancher, sa cheminée, ses stucs et ses boiseries est typique du décor des salons du XVIIIe siècle tel qu'il s'est prolongé dans le cours du XIXe siècle.
2. Le salon de musique avec sa cheminée, ses boiseries nombreuses et ses stucs est à la fois salon de musique et bibliothèque. Celle-ci est représentative des préoccupations intellectuelles et spirituelles de la famille Rops en son temps. La pièce a pu préserver son papier peint naturaliste d'origine.
3. La chambre bleue avec sa cheminée d'angle et son lit à baldaquin servait de chambre d'ami. Baudelaire y dormit lors de son séjour à Thozée.
4. La salle à manger. Plus tardive, elle pourrait paraître moins intéressante. Elle est cependant représentative du type de salle à manger de la bourgeoisie de l'époque avec ses boiseries et son plafond peint par Lambrichs, un ami de Félicien Rops.
5. Le salon vert, avec ses boiseries (portes, cheminée, fenêtres et horloge encastrée) forme un ensemble harmonieux.
Le grand couloir du rez-de-chaussée est très sobre, il donne accès aux différentes pièces précitées.
LA FAUNE ET LA FLORE
L'esprit se trouve en nature et c'est celui-là qu'il faut peindre ...
De Félicien Rops à Théo Hannon, 1868, www.ropslettres.be, n°éd. 2068.
Le jardin et les étangs méritent une attention particulière. D'un jardin à la française strictement axé sur la médiatrice de la façade du château et sur la limite ouest d'un bocage boisé, il s'est transformé en un jardin anglais, plus romantique, où les matériaux durs (vasques, balustrades, bancs,...) se mêlent aux sculptures végétales des ifs.
Un verger conservatoire jouxte le château. Il s'étale sur un beau coteau et est peuplé de vieux pommiers de variétés typiques de la région. De plus jeunes arbres ont peu à peu été plantés pour remplacer ceux que le poids des ans avait abattus.
Une variété inconnue ailleurs a même été identifiée et nommée 'Pomme de Thozée' en accord avec le Centre Agronomique de Gembloux. Une 'Belle de Brogne' originaire du village tout proche de Saint-Gérard a aussi été plantée.
Tous ces arbres permettent une belle récolte de pommes qui sont principalement destinées à produire un bon jus. Jus qui est proposé lors des fêtes et évènements au château.
LE PROJET DE RESTAURATION
Afin de sauver le château de Thozée du délabrement, de la ruine et de l'oubli, notre programme, suivant les voeux d'Elisabeth Rops, s'appuie sur les potentialités du lieu et la richesse de sa structure. `
La disposition des lieux et leur rapport au paysage inspirent le calme et le recueillement. Ils sont particulièrement propices à la tenue de séminaires, de colloques et autres activités culturelles. La ferme, composée d'éléments morphologiquement distincts organisés autour d'une cour arborée, est particulièrement adaptée pour accueillir des artistes, chercheurs ou écrivains dont l'activité nécessite un lieu de travail et un cadre propice à la création. Au delà de son intérêt historique et artistique, c'est le charme et la tranquillité de cette gentilhommière, dans un environnement resté intact, qui en fait un superbe et insolite lieu de travail.
Un tel programme offre, par sa souplesse, la possibilité d'adapter le rythme de sa mise en œuvre à celui de la restauration des différents bâtiments.